23 / 11 / 2022
La résistance à l’insuline : une pandémie mondiale
Marion kaplan : Pourquoi voulez-vous parler de la résistance à l’insuline, Marimiina ?
Marimiina Pykalisto: Parce que ce phénomène est aujourd’hui très commun et son impact sur la santé est désormais mondial. Aux États Unis 40% les jeunes adultes non diabétiques sont résistants à l’insuline. Nous ne sommes pas très loin de ces chiffres en Europe. La résistance à l’insuline ne touche pas seulement les gens en surpoids, mais il y a de plus en plus de personnes minces qui sont concernées. En anglais on parle des « skinny fat », des gens minces mais ayant beaucoup de graisse corporelle, car même si de l’extérieur ces personnes ne semblent pas en surpoids, il leur manque des muscles et elles ont à la place beaucoup de tissu adipeux, qui est métaboliquement lent et faible, et qui prédisposent ces individus à être résistants à l’insuline.
Les causes et les effets de la résistance à l’insuline sont mortifères. En effet, ce phénomène crée une augmentation des pro-oxydants qui entrainent un stress oxydatif et de l’inflammation. Avec la résistance à l’insuline, ces deux symptômes sont au cœur de toutes des maladies occidentales, des maladies cardiovasculaires, du syndrome métabolique, de l’infertilité et des problèmes hormonaux ainsi que des cancers. La résistance à l’insuline est également fortement liée au vieillissement prématuré. Les études ont montré que plus le taux d’insuline est bas, plus longue est l’espérance de vie en bonne santé.
Revoir le direct avec Marion Bartoli :
Quand on parle de la résistance de l’insuline, je pense qu’il faudrait d’abord comprendre le rôle de l’insuline. Pourriez-vous nous l’expliquer ?
Il faut effectivement connaître son rôle et surtout comprendre que l’insuline n’est pas seulement quelque chose de néfaste. L’insuline est une hormone, peut-être une des plus importante pour l’organisme, qui a un impact dans toutes les cellules du corps. Elle est le régulateur par excellence de plusieurs fonctionnement métaboliques, comme la production d’énergie, c’est à dire la façon dont les mitochondries utilisent les lipides et les sucres pour produire l’énergie. L’insuline est nécessaire pour amener le glucose de la circulation sanguine vers les cellules, elle régule donc la glycémie. Quand le taux de l’insuline est élevé, le corps commence à stocker des lipides. L’insuline élevée empêche ainsi l’utilisation des lipides comme source d’énergie. L’insuline est donc une hormone de croissance. Les femmes sont naturellement résistantes à l’insuline pendant la grossesse, et aussi pendant l’adolescence car elles sont en pleine croissance.
L’insuline impacte la sécrétion des autres hormones ; les taux élevés d’insuline augmentent la testostérone, l’adrénaline, le cortisol et baissent le taux de progestérone, ce qui peut rendre les femmes « estrogène dominante ». L’insuline est également importante pour activer la réponse « flight or fight » c’est-à-dire qu’elle active tous les mécanismes de défense nécessaires pour fuir ou combattre. On devient résistant à l’insuline quand on est stressé, pour protéger la disponibilité du glucose, donc l’apport d’énergie aux muscles et au cerveau.
L’insuline est donc très importante, mais que se passe-t-il alors quand on est résistant à l’insuline ?
La résistance à l’insuline est un phénomène où les cellules sont devenues résistantes aux effets de l’insuline ; elles ne répondent plus à l’insuline qui « frappe à la porte » en essayant d’amener le glucose dans les cellules. Cela arrive quand il y a chroniquement trop d’insuline dans la circulation sanguine. Donc quand on se retrouve en état d’hyper insulinémie. Ces deux termes sont les deux faces d’une même pièce. Ils ne peuvent pas exister l’un sans l’autre. Au début les cellules ferment leurs portes aux récepteurs de l’insuline, car il y en a déjà assez et elles ne peuvent plus en prendre davantage, les récepteurs devenant alors résistants pour se protéger. Puis avec le temps, elles n’arrivent plus à capter le glucose nécessaire, donc il n’y aura plus assez de glucose pour produire l’énergie. C'est là qu'on peut commencer à ressentir des symptômes de fatigue.
La résistance à l’insuline n’impacte pas seulement l’utilisation et le stockage du glucose. L’organisme ne peut stocker que très peu de glucose à la fois, entre 500-700g dans le foie et dans les muscles sous la forme de glycogène. Le reste va être stocké sous forme de lipides. L’insuline chroniquement élevée va donc impacter la façon dont le foie va traiter les lipides. La résistance à l’insuline nous amène donc vers un métabolisme des lipides perturbé, qu’on peut constater dans les marqueurs du cholestérol, surtout dans le taux de LDL qui change pour préférer des molécules LDL plus petites, ce qui peut augmenter l’inflammation. De même le foie « n’écoute » plus la signalisation de l’insuline qui normalement arrête la glycogénolyse, c’est à dire la production du glucose à partir du glycogène.
D’où provient l’hyperglycémie dans cette histoire ?
L'hyperglycémie est un phénomène qui fait suite à la résistance à l’insuline, une fois que celle-ci devient chronique. Et non pas l’inverse, comme on a pu le penser auparavant. En fait, le corps essaie de garder l’équilibre de la glycémie aussi longtemps qu’il le peut, car l’hyperglycémie est très dangereuse pour tout l’organisme. Cela augmente l’acidité, ce qui au niveau sanguin est très délétère. Pour baisser la glycémie élevée (après un repas ou suite à du grignotage sucré) les cellules bêta du pancréas secrètent de l’insuline, ce qui augmente le taux d’insuline, et l’insuline transporte le glucose (c'est à dire les sucres) pour être utilisé, soit pour la production d’énergie, soit pour être stocké sous forme de lipides. Cela va baisser la glycémie. Il en résulte que la glycémie peut rester « normale » assez longtemps, parfois même une décennie, avant que l'on constate des changements au niveau de la glycémie. C’est la raison pour laquelle le diagnostic du diabète a été largement critiqué par les scientifiques et par les médecins qui pratiquent la médecine fonctionnelle, car ils se focalise trop souvent sur la glycémie sans observer le taux d’insuline.
C’est donc la résistance à l’insuline qui nous amène vers l’hyperglycémie et les maladies chroniques occidentales. Qu’est-ce qui nous amène vers la résistance à l’insuline ? Quelles sont les causes de ce phénomène ?
Il y en a plusieurs, mais la cause la plus importante est l’alimentation. Trop d'apport de glucides, donc de sucres, et bien trop de sources d’énergie ingérées par l'alimentation, par rapport à l’énergie dépensée. Ce ne sont pas les calories absorbées vs. dépensées, car les calories n’ont pas toutes la même valeur, mais au final le trop plein d’énergie disponible versus l’énergie effectivement utilisée.
La raison pour laquelle le sucre alimentaire, qui contient du glucose et du fructose, est néfaste, réside dans l’usage de leurs voies métaboliques. Le glucose, comme décrit, est dépendant de l’insuline pour être utilisé comme source d’énergie. S’il y a trop de glucose, on a besoin de sécréter beaucoup d’insuline. L’insuline perturbe et diminue la bêta-oxydation, donc l’utilisation des lipides comme source d’énergie, et en revanche déclenche le stockage et l’augmentation de la taille des cellules adipeuses. Quand la sensibilité à l’insuline baisse, la pulsation de la sécrétion de l’insuline est perturbée et cela perturbe ensuite le métabolisme énergétique, ainsi que des cascades inflammatoires du fait des pro-oxydants trop élevés. On va souvent avoir un déséquilibre dans le ratio adiponectine et leptine, ce qui nous empêche de bien ressentir la satiété. Enfin le glucose peut être converti en fructose, surtout si la consommation de sel industriel est élevée ou si la consommation d’alcool est élevée.
Mais c’est bien que le glucose soit converti en fructose, non ? Le fructose est le sucre naturellement présent dans les fruits, il est donc plutôt bon, n’est pas ?
On pourrait croire cela, et on a pensé que c’était le cas auparavant, mais maintenant les études ont montré que la vérité est inverse. Le fructose est même pire que le glucose, et ce même s’il n’est pas dépendant de l’insuline.
Comment cela ? Pourriez-vous l’expliquer, s’il vous plait ?
En fait le fructose diminue la beta oxydation, comme le glucose, mais en plus de cela, afin de métaboliser le fructose, le corps a besoin de beaucoup d’énergie, d’ATP, et en l’utilisant il produit de l’acide urique comme un métabolite secondaire. L’acide urique provoque le stress oxydatif dans les mitochondries et perturbe la production d’énergie.
Donc, on se sent fatigué, et on n’arrive même à moins bien utiliser toute l’énergie qu’on absorbe ?
Absolument. En plus le fructose, davantage que le glucose, semble déclencher la résistance à l’insuline par des mécanismes complexes qui perturbent le fonctionnement optimal du foie. En fait, les études constatent que c’est surtout le fructose qui conduit aux problèmes métaboliques et pas le glucose seul, et sans nécessairement grossir. Donc, c’est le fructose qui peut expliquer la sévérité de la résistance à l’insuline parmi les personnes qui ne sont pas en surpoids.
Et le stress, ou la pollution ? On parle beaucoup des glyphosates et des autres polluants ainsi que des faiblesses génétiques ?
Tout à fait, ces facteurs jouent chacun un rôle important. Le stress peut déclencher la résistance à l’insuline, ainsi que la pollution, mais je ne pense pas qu’ils pourraient le faire en l’absence des sucres alimentaires. En revanche les faiblesses génétiques peuvent nous rendre plus sensibles face à la résistance à l’insuline, mais sans les facteurs épigénétiques, comme l’alimentation et le mode de vie, les gènes seuls ne pourraient pas déclencher ces problèmes métaboliques.
Tout cela semble presque indiquer que le corps fonctionne contre nous ; on n'est pas fait pour vivre comme on vit aujourd’hui. Tout ce qu’on fait ou qu’on aime bien consommer, nous dirige vers une résistance à l’insuline. C’est quand même frustrant, non ?
En effet, malheureusement nos variations génétiques n’ont pas beaucoup changé pendant ces derniers siècles, alors que la civilisation humaine a vécu la révolution industrielle et alimentaire. Nos gènes sont programmés pour la survie et pour lutter contre la famine. Ils ne sont pas faits pour l’abondance et la gourmandise au niveau de l’apport alimentaire, ni au stress mental auquel on doit faire face aujourd’hui.
Les anglo-saxons parlent de « Thrifty genes », en français on pourrait parler de gènes économes ou gènes frugaux pour expliquer comment nos gènes nous entrainent à devenir obèses et résistants à l’insuline. C’était protecteur quand on vivait dans la jungle parmi des dangereux prédateurs et lorsque l’on avait très peu à manger pour subsister.
Ce n’est donc pas notre faute si on est résistants à l’insuline. C’est la faute à la nature ?
Exact et il y a des chercheurs qui l’ont bien expliqué. Il y a d’ailleurs un livre écrit par un scientifique très connu, le Dr Richard Johnson, «Nature wants us to be fat» - la nature veut qu’on soit obèse-. Le Dr Johnson utilise le terme « metabolic switch et fat switch », c’est à dire l’interrupteur métabolique et l’interrupteur lipidique, c’est pour expliquer que nos gènes se mettent dans un mode de « survie » lorsqu’il y a beaucoup de nourriture disponible afin qu’il puisse stocker le plus possible. C’est le même mécanisme qui permet aux ours d’hiberner pendant d’hiver.
Tout cela ne veut pas dire qu’on ne pourra pas agir, car au contraire, grâce à l’épigénétique, on peut changer l’expression de ces gènes frugaux, et éviter ce phénomène pandémique mortel de résistance à l’insuline.
D’accord, on a beaucoup parlé de biochimie ce qui peut être très compliqué. Concentrons-nous alors sur le côté pratique pour qu’on puisse agir en tant qu’individus. Pour commencer pourriez-vous nous expliquer les symptômes de la résistance à l’insuline afin qu’on puisse les identifier ?
Il y en a plusieurs. Le premier est peut-être la fatigue persistante et chronique, et qui se manifeste surtout après les repas. La fatigue est très marquée surtout pour ceux qui sont résistants à l’insuline sans être en surpoids.
L’autre symptôme est l’incapacité de faire des jeûnes intermittents, entrainant des migraines et des maux de tête ainsi qu'une baisse des capacités cognitives et de la concentration, des problèmes de mémoire : Parkinson, Alzheimer et la démence sont très liées à la résistance à l’insuline.
Il y a aussi les problèmes hormonaux : l’infertilité, le syndrome prémenstruel et le syndrome des ovaires poly-cystiques, la baisse de libido…
Des symptômes bien plus graves et parfois non diagnostiqués sont les maladies cardiovasculaires ; les études indiquent que la tension artérielle est causée par la résistance à l’insuline. D’ailleurs les statines, souvent prescrites pour les personnes ayant des maladies cardiovasculaires, peuvent augmenter le risque de résistance à l’insuline.
Et le vieillissement ? Au début vous disiez que la résistance à l’insuline pouvait causer un vieillissement prématuré ?
C’est juste, cela peut aussi être un des symptômes. Les rides, la ménopause précoce, la fatigue cognitive… au niveau cellulaire on le voit clairement, et surtout quand on parle de l’âge chronologique versus l’âge biologique ; le vieillissement cellulaire est la cause qui nous fait vieillir plus rapidement.
Comment on peut savoir si on est résistant à l’insuline ? Est-ce qu’on peut le mesurer ?
On devrait le faire systématiquement. Les marqueurs le plus parlants sont la glycémie à jeun, l’insuline à jeun, l’hémoglobine glyquée et l’acide urique qui indique le taux de stress oxydatif. La glycémie seule ne veut rien dire, ce marqueur est très sensible au stress et même à l’effort physique et il est le dernier à bouger. (optimal < 90-100mg/l ou > 4,7-5 mmol/l)
En revanche avec l’insuline à jeun, on peut mesurer l’index HOMA qui indique bien le dysfonctionnement métabolique. Déjà l’insuline à jeun seule (optimal) de 2-66uIU/ml indique une résistance à l’insuline (HOMA-IR optimal < 2-3).
L’hémoglobine glyquée montre la fluctuation de la glycémie pendant les 3 derniers mois, cette mesure est plus précise que la glycémie et si elle est élevée, elle indique la glycation, c’est-à-dire la « caramélisation » des lipides ou des protéines.
Est-ce que vous pensez au cholestérol ? Est-ce qu’il faut le mesurer ?
Oui et surtout le ratio de triglycérides HDL qui indique nettement la possibilité de résistance à l’insuline. Les triglycérides augmentées indiquent toujours un problème métabolique et la surconsommation de glucides et/ou d’alcool. (TG/HDL ratio : optimal 1 :1 Tg seul : < 70-100mg/dl). On peut aussi faire le ratio du cholestérol total au HDL, même s’il n’est pas aussi bon que le TG/HDL ratio. (L’optimal étant 2 :1, 3,5 :1)
Bien évidemment on peut aller beaucoup plus loin et regarder les marqueurs de l’inflammation comme le CRP et la ferritine, ainsi que les cofacteurs du métabolisme très important comme la vitamine D, le magnésium, le sélénium, le zinc, le coQ10 etc.
Si on veut avoir une vision complète, il faudrait aussi connaître son patrimoine génétique et notamment ses faiblesses génétiques concernant le métabolisme énergétique. Si possible aussi connaître ses faiblesses face au stress oxydatif et les réactions inflammatoires ainsi que les faiblesses et les forces dans la détoxification. Toute cette information nous explique notre sensibilité face à la résistance à l’insuline ainsi que les maladies et dysfonctionnements que cela peut provoquer.
Une fois qu’on a constaté par les analyses, qu’est-ce qu’on peut faire ? Est-ce que c’est déjà trop tard on est-ce qu’on peut agir ?
Non seulement on peut agir, mais aussi 100% sans médicaments. La clé est de rendre l’organisme métaboliquement flexible, ce qui veut dire que les mitochondries peuvent utiliser des lipides et des glucides comme source d’énergie. L’idée ce n’est pas d’utiliser seulement des lipides, comme le propose le régime cétogène par exemple, mais de pouvoir switcher entre des lipides et des glucides, un peu à la manière d’une voiture hybride. Comme je l’ai dit, si l’insuline est chroniquement élevée, des mitochondries n’arrivent pas à utiliser des lipides, donc on n’est pas métaboliquement flexible. Il faut donc baisser l’insuline. Plus on baisse l’insuline, mieux nos gènes fonctionnent pour nous, et donc mieux ce switch métabolique fonctionne pour notre bénéfice.
Il faut dans le même temps opter pour un mode de vie et une nourriture anti-inflammatoire et antioxydante, car la résistance à l’insuline augmente les radicaux libres qui déclenchent le stress oxydatif et l’inflammation.
Alors, comment on se rend métaboliquement plus flexible ?
Il y a 5 facteurs qui sont chacun très importants, que l’on peut et devrait faire tous les jours d’une façon modérée et personnalisée, en respectant notre propre patrimoine génétique. Ces facteurs sont l’alimentation, la gestion du stress et du sommeil, l’exercice, le jeûne intermittent intelligent et le stress hormétique.
Pourriez-vous nous expliquer l’importance de chacun ?
Commençons par l’alimentation. Fondamentale car sans une alimentation adaptée, on ne peut pas y parvenir. On ne pourra pas baisser le taux d’insuline sans changer l’alimentation et la façon dont on mange.
Un régime peu glucidique, voir même cétogène, pendant une période plus ou moins longue, est très conseillé. Pour le régime cétogène il vaut mieux connaître ses gènes pour savoir comment le métabolisme des lipides fonctionne, afin de connaître sa capacité d’utiliser des lipides pour produire l’énergie. Concernant des lipides, il faut privilégier des lipides anti-inflammatoires. Le plus problématique est l’acide linoléique, comme l’huile de colza, de tournesol, de soja etc… Ce sont les fameux Oméga 6, car ils deviennent facilement pro-inflammatoires. Les acides gras saturés sont beaucoup plus sécurisants, car ils sont beaucoup plus stables, dixit les nouvelles études.
Évidemment l’information qu’on peut tirer des tests ADN nous aide aussi à préciser si nous devons être strict avec les glucides. Parfois il vaut mieux éviter les fruits en grosse quantité et sans accompagnement, éviter les glucides le soir et le matin, ainsi que limiter fortement les céréales, voire même les légumineuses.
Sinon il faut privilégier les aliments qui contiennent des fibres alimentaires, comme des légumes, des graines, des baies et des fruits en modération. Cela va ralentir l’absorption des glucides, des sucres, ce qui par conséquent ralentit la sécrétion de l’insuline.
Il faut aussi privilégier des protéines. C’est peut-être la règle la plus importante car on n’en mange souvent pas assez. Il faut compter entre 1-1,5g/ kg par jour. Pour les sportifs et ceux qui veulent développer leurs muscles, il faut compter 1,5g/kg. La même chose pour les gens au-delà de 60 ans. Ce sont les protéines qui nous donnent le plus facilement la sensation de satiété ainsi que nous aident à développer nos muscles et maintenir notre structure corporelle, ce qui renforce le métabolisme et nous protège contre le vieillissement. N'oublions pas qu'un steak de 100g ne contient que 20g de protéines et un œuf 13g !
Enfin, si on a des faiblesses génétiques dans la production innée des antioxydants, il faudra privilégier les antioxydants alimentaires, autrement dit, manger des couleurs. Cinq couleurs dans une assiette et un arc-en-ciel par jour est une bonne règle à suivre.
Est-ce qu’il y des compléments alimentaires qui peuvent être bénéfiques ?
Les meilleurs compléments probables pour baisser l’insuline et la glycémie élevés sont la berbérine, l’acide alpha lipoïque, le coQ10, le chrome, le zinc et le magnésium. Avoir un taux suffisant de vitamine D est très important aussi.
D’ailleurs concernant les antioxydants c’est la vitamine C qui est la plus forte dans la protection des mitochondries, car elle aide à désactiver le switch métabolique.
Et des probiotiques, est-ce qu’ils jouent un rôle ?
Très probablement. En revanche, il faut admettre qu’on ne connaît pas parfaitement tout ce qui se passe dans les intestins et dans le tube digestif. Concernant les probiotiques, je pense qu’il y a encore beaucoup de marketing … On commence à connaître un peu les espèces bénéfiques et néfastes, mais on sait aussi qu’on a tous et toutes un microbiote unique. Les mêmes probiotiques peuvent très bien fonctionner pour l’un, et pas du tout pour l’autre… Notre connaissance est encore diffuse.
On sait aussi qu’il a des probiotiques, comme Akkermansia, qui semblent très intéressant ; d’ailleurs on vient de commencer à obtenir les premiers produits sur le marché, mais il n’y a pas encore de feedback probant pour savoir si ces produits marchent vraiment… Personnellement je vois les taux hauts d’Akkermansia chez des gens qui ont quand même des problèmes, alors que ce taux élevé est considéré comme protecteur… Ce n’est donc pas si simple…Tout est question de dosage !
Qu’est-ce que vous conseillerez dans ce cas ?
Je suis plutôt favorable aux aliments fermentés c’est à dire des pré- et probiotiques naturels, comme le poireau, les olives, les artichauts, du kimchi, la choucroute, miso, tempeh, yogourt , des fibres et des antioxydants alimentaires. Les oméga-3 sont aussi très importants pour la paroi intestinale. Les probiotiques industriels sont bénéfiques en cure après la prise d’antibiotiques, ou après une crise de diarrhée...
Vous mentionnez le jeûne intermittent intelligent comme étant un facteur clé. Quel rôle joue t'il et pourquoi doit on le faire intelligemment ?
Le jeûne intermittent est très efficace, car il permettra l’utilisation des stockages ; on peut ainsi bruler des lipides. Lorsqu’on n’est pas métaboliquement flexible, il faut y aller doucement. Si on n’a jamais jeûné et qu’on a eu une tendance à grignoter ou à faire plusieurs repas par jour, on ne doit pas se lancer dans un jeûne de 16h car cela est trop stressant pour le corps. Quand le cortisol ou l’adrénaline sont secrétés, le foie commence à secréter de l’insuline, ce qu’il faut éviter. Pratiquer le jeûne intermittent intelligent, c’est le faire progressivement par étape. On peut commencer par 12h, cela devrait être la norme car c’est le jeûne nocturne minimal. Petit à petit on peut avancer à 14h puis 17h et puis, lorsqu’on se sent à l’aise, on peut faire un jeûne de 24h, ce qui est très efficace pour nettoyer les intestins. Attention ce jeûne-là est conseillé 2-4 fois par mois. Pour les femmes fertiles, il faut aussi prendre en compte le cycle. Les gènes jouent un rôle là aussi, il y a des personnes qui sont plus agiles avec le jeune intermittent.
Est-ce qu’il faudrait jeuner plutôt le matin ou le soir ?
Les études disent que le soir est plus efficace, mais c’est aussi plus compliqué. Le diner étant le repas le plus social, donc mentalement plus dur de s’en priver. On peut, lorsqu’on est agile, sauter 1 ou 2 diner pendant la semaine pour faire un jeune plus long. Ce qui est très important, même peut être plus que le temps du jeun, ce sont les aliments avec lesquels on achèvera le jeun. Il faut éviter les glucides ! Le mieux ce sont des lipides et des protéines. Si on fait un jeûne de 24h il faut privilégier des aliments fermentés.
J’imagine alors que la gestion du stress est clé pour réussir le jeûne intermittent ?
Le stress fait monter la glycémie et augmente la sécrétion d’insuline du fait de la sécrétion d’adrénaline et du cortisol. Le stress perturbe aussi la qualité du sommeil et on sait que le sommeil est fondamental pour toute guérison. Les études montrent qu'il suffit de deux nuits blanches pour nous rendre résistant à l’insuline. Le dysfonctionnement du nerf vague, l’activation chronique du système nerveux sympathique, compliquent également la digestion et l’absorption.
Vous nous avez parlé du stress hormétique. Qu’est-ce que c’est ?
Le stress hormétique c’est l’exposition à un stress intense mais de courte durée et peu fréquent. Ce stress, aigu mais rare, fatigue peu l'organisme et provoque lors de phase de repos une réparation optimale pour l’organisme. Cela active des cascades réparatrices dans l’organisme, comme la production innée des antioxydants et une bonne réponse immunitaire. On peut créer ces petits stress en s'exposant au chaud ou au froid intenses, comme par exemple le sauna, les baignades dans les rivières, lac ou les mers froides, une douche froide, et bien sûr par des jeûnes intermittents d'une durée de 17h à 19h.
Donc l’exercice est une forme de stress hormétique, un stress souhaitable ?
Il faut bouger ! On sait qu’après seulement 30 minutes d'exercice physique où on a transpiré, la sensibilité à l’insuline baisse déjà. L’exercice est nécessaire. Rappelez-vous qu’il suffit seulement de 4 à 5 jours sans bouger pour commencer à faire fondre sa masse musculaire.
Le mieux selon les études, serait un exercice dit de « zone 2 » qui est un exercice aérobique doux, comme la randonnée, la marche nordique, le yoga…, et pratiqué d’une manière douce nous permettant de discuter oralement dans le même temps. Il faudrait le pratiquer pendant 30-60 minutes par jour, et de préférence à l’extérieur, surtout si on a des faiblesses génétiques dans sa production d’antioxydants.
Pour ceux qui veulent gagner du temps, je recommande HIIT, une application de sport qui mélange la musculation et l’aérobic et qui déclenche vraiment le stress hormétique.
Marion kaplan & Marimiina Pykalisto
Marimiina PYKALISTO est une nutritionniste certifiée spécialisée en médecine fonctionnelle et en épigénétique. Au sein de l’institut Génie Santé (www.geniesante.com) elle forme actuellement des thérapeutes et médecins à utiliser des tests et outils de génétique et de médecine fonctionnelle, afin d’élargir leurs compétences et améliorer les résultats cliniques.
Marimiina se concentre sur la recherche des causes profondes de nombreux problèmes de santé, l'optimisation de la santé, du bien-être et des performances tant physiques que mentales de ses patients. Son approche combine des données physiologiques (délivrées par divers tests de médecine fonctionnelle et génétique, objets connectés et autres outils) avec sa compréhension de l'état d'esprit et de la psyché humaine, et de ce qui nous motive ou nous empêche, pour atteindre notre état optimal. Cette approche lui permet de proposer un plan d'action individualisé pour chaque personne, qui tient compte de ses forces et de ses faiblesses uniques, compétences et besoins, en utilisant une palette d’outils innovants, allant ainsi au-delà de la nutrition et des modifications de mode de vie les plus courantes.