14 / 01 / 2025
Focus sur les PFAS ou polluants éternels, et comment s’en protéger au mieux
J’ai posté récemment une vidéo sur ma chaine YouTube à propos des toxiques. Une prise de conscience est urgente et nécessaire ! Ces polluants sont invisibles et entrainent des dégâts, pour certains, sur plusieurs générations ! Il est temps d’agir !
Les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées, dites PFAS, font aujourd’hui l’objet d’une surveillance rapprochée au niveau international. Mieux vaut tard que jamais dit le dicton, même si c’est quand même bien tard… Cela fait des décennies que nous sommes exposés à ces « polluants éternels » via la nourriture que nous mangeons, l’air que nous respirons, les vêtements que nous portons, les crèmes dont nous nous badigeonnons… Persistants dans l’environnement, ils s’accumulent aussi dans notre organisme, non sans conséquences délétères pour notre santé. Focus sur les PFAS et comment s’en protéger au mieux.
Des milliers de PFAS différents
Les PFAS constituent une grande famille de composés chimiques de synthèse dont le nombre exact n’est pas connu, mais dont on sait qu’il existe plusieurs milliers. 256 PFAS seraient produites industriellement, mais il pourrait en exister entre 4 000 et 14 0001.
Les plus connues de ces substances nocives sont le PFOS et le PFOA2, qui sont jugés très problématiques, au niveau international, en raison de leur niveau de toxicité important pour l’Homme et ont été déjà fortement restreints, voire interdits. Le PFOA est classé « cancérogène pour l’Homme » et le PFOS « peut-être cancérogène pour l’Homme »3.
Les PFAS contiennent une chaîne plus ou moins longue d’atomes de carbone et de fluor dont la liaison chimique (carbone-fluor) particulièrement stable fait que ces substances se dégradent très peu après utilisation ou rejet, et sont extrêmement persistantes. D’où leur appellation de polluants éternels.
Difficile d’y échapper
Le très gros problème, c’est qu’ils sont littéralement partout - ce qui fait qu’on peut difficilement y échapper -, et ils sont aussi terriblement nocifs, interférant notamment avec le système hormonal.
Plusieurs PFAS ont en effet été identifiés comme perturbateurs endocriniens4, en raison de leur capacité à interférer avec la fonction de reproduction et la signalisation hormonale5.
Les propriétés spécifiques que les PFAS présentent - antiadhésives, ignifuges, antitaches, imperméabilisantes, résistantes aux fortes chaleurs… -, font que ces composés chimiques sont utilisés dans une large variété de produits de consommation et d’applications industrielles. Ces substances sont ainsi présentes depuis les années 1950 dans de nombreux objets du quotidien, comme des ustensiles de cuisine (revêtements antiadhésifs pour poêle à frire) ou des produits cosmétiques, mais aussi les emballages alimentaires en papier et autres matériaux en contact avec la nourriture, les mousses anti-incendie, certains vêtements (textiles pour meubles et vêtements d’extérieur), les produits de nettoyage (sprays pour meubles et tapis) et lubrifiants, les gaz réfrigérants, les batteries et panneaux solaires, les pesticides, les dispositifs médicaux, les produits pharmaceutiques… La liste est terriblement longue ! Leur persistance délétère fait qu’on les retrouve dans les sols, l’air et l’eau. Une contamination généralisée à laquelle nous sommes constamment exposés.
Les principales voies d’exposition humaine et environnementale
Les sources de PFAS comprennent pour la population générale, l’eau potable, les aliments, les produits de consommation et la poussière6. Ainsi, soit nous les ingérons (via l’alimentation), soit nous les respirons (air et poussière intérieurs et extérieurs, sprays divers), soit nous les absorbons par la peau via les cosmétiques et autres produits de consommation, comme les cires pour la peau, le cuir, et les textiles d’extérieur.
Dans l’alimentation, les espèces de poissons situées au sommet de la chaîne alimentaire et les crustacés représentent des sources importantes d’exposition aux PFAS. Les animaux (vaches, chèvres, volailles…) élevés sur des terres contaminées peuvent accumuler des PFAS dans leur viande, leur lait et leurs œufs7.
Une contamination environnementale et humaine mondiale
Non seulement les PFAS ne se dégradent pas dans l’environnement, mais ils peuvent également persister plusieurs années dans l’organisme. Et s’accumuler. Et c’est un fait que nous sommes tous contaminés. Ce, au niveau mondial.
En France. Des membres de cette très nombreuse famille sont retrouvés dans le sang de tous les Français lors des enquêtes de surveillance.
En Europe. Comme le souligne l’Agence européenne de l’environnement8, les activités de surveillance nationale ont détecté des PFAS dans l’environnement à travers l’Europe. Et d’ajouter que la production et l’utilisation de PFAS dans les produits ont entraîné la contamination des approvisionnements en eau potable dans plusieurs pays européens.
Quant aux enquêtes de biosurveillance humaine, elles ont détecté un éventail de PFAS dans le sang des citoyens européens. Dans le détail, les niveaux de PFOA et PFOS (qui sont les PFAS les plus répandus, étudiés et réglementés) ont certes diminué, mais d’un autre côté les niveaux de PFAS plus « nouveaux » augmentent9.
Aux États-Unis, au moins un type de produit chimique PFAS a été détecté dans le sang de presque toutes les personnes échantillonnées dans le cadre du programme national de biosurveillance des États-Unis10.
Quelques mots sur le « nouveaux » PFAS
Les PFAS réglementés ont en effet généralement été remplacés par des PFAS dits à chaîne courte11. Mais voilà, comme le montrent différentes études, souligne l’Agence européenne de l’environnement, plusieurs de ces « nouveaux » PFAS et leurs produits de dégradation à chaîne courte s’accumulent dans l’environnement et se sont révélés contaminer les eaux de surface, souterraines et potables, et s’accumuler dans les plantes (2019), ce qui peut potentiellement augmenter notre exposition alimentaire.
De nouveaux PFAS sont de plus en plus détectés dans les eaux de surface européennes. C’est ainsi, détaille l’EEA, qu’une pollution de l’eau aux PFAS a été identifiée dans des pays à travers l’Europe, notamment en Autriche, au Danemark, en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Suède.
Et l’EEA d’ajouter que plusieurs PFAS sont suffisamment volatiles pour être considérés comme des polluants atmosphériques transfrontaliers à longue distance. Ce qui implique que les émissions peuvent s’accumuler dans des zones froides telles que l’Arctique12.
Les conséquences sur la santé
Les conséquences sur la santé de l’exposition aux PFAS varient selon le niveau d’exposition et l’âge. Et bien sûr aussi selon les susceptibilités de chacun.
Les PFAS s’accumulent dans l’organisme principalement dans certains tissus comme le sang, le tissu rénal ou hépatique13.
Différentes études ont mis en évidence un risque accru de cancer du rein, du sein et des testicules, ainsi que des dommages au foie, des maladies thyroïdiennes, des perturbations de la réponse immunitaire et une hausse du taux de cholestérol. D’autres effets comme l’infertilité, des retards de croissance ou encore le diabète, sont également fortement évoqués mais doivent être confirmés en menant d’autres études, relaie l’Inserm14.
Selon une recherche récente15, les lésions rénales pourraient s’expliquer par un dérèglement du microbiote intestinal - plus pauvre en bactéries bénéfiques et métabolites anti-inflammatoires - induit par les PFAS. Les chercheurs ont en effet découvert qu’une exposition accrue aux PFAS était associée à une détérioration de la fonction rénale quatre ans plus tard et que les modifications du microbiote intestinal et des métabolites expliquaient jusqu’à 50% cette diminution de la fonction rénale.
Certains PFAS sont, comme nous le disions un peu plus haut, des perturbateurs endocriniens. Les mécanismes biologiques reliant l’exposition à divers perturbateurs endocriniens et l’obésité font l’objet de nombreuses recherches et les données toxicologiques disponibles indiquent, comme le souligne l’Inserm16, que certains d’entre eux peuvent altérer le développement et la fonction du tissu adipeux, du foie, du pancréas, du tractus gastro-intestinal, mais également du cerveau. Des modifications du contrôle de la faim et de la sensation de satiété ainsi que du métabolisme en résulteraient, ce qui augmenterait la susceptibilité à l’obésité. La sensibilité à l’exposition serait plus importante in utero et au cours de la petite enfance, avec des modifications épigénétiques (Lien Génétique et épigénétique : comment ne pas tomber malade) potentiellement transmissibles aux générations futures.
Les femmes enceintes constituent aussi un public vulnérable.
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Des personnes plus exposées que d’autres
On peut également s’inquiéter des personnes particulièrement exposées aux PFAS dans le cadre de leur travail notamment dans les secteurs de l’agroalimentaire, l’industrie textile ou l’électronique, où elles peuvent être amenées à manipuler ces substances. De même, le fait d’habiter à côté des sites industriels augmente l’exposition à ces produits délétères.
Cela n’est guère rassurant, d’autant que nous demeurons aujourd’hui dans l’inconnu total quant aux effets de tel ou tel PFAS, tant il en existe des milliers différents et autant de mélanges. Une grosse épine dans le pied de la recherche scientifique qui se retrouve dans la quasi-impossibilité d’étudier ou de savoir avec certitude les effets d’un PFAS donné.
Alors, si nous ne pouvons certes pas y échapper complètement, quelques astuces existent toutefois pour limiter notre exposition dans nos objets du quotidien.
Comment éviter au mieux les PFAS
L’utilisation de PFAS n’étant pas forcément étiquetée sur les produits, quelques astuces permettent de savoir qu’ils en contiennent. Et donc de les fuir.
Les vêtements tout d’abord, dès lors qu’il est écrit « imperméable », « antitache », « antisalissure », vous pouvez être quasiment sûr qu’ils en contiennent. Vous pouvez aussi faire le test de la goutte d’eau sur votre vêtement : si elle perle et glisse sans laisser de traces, il en contient.
Concernant vos matériels de cuisson, poêles, fait-tout, etc., vous aurez compris qu’il faut fuir tout ce qui est « antiadhésif », et aussi dont le fond est de couleur noire, et privilégier la fonte, l’inox ou la céramique. Certaines poêles mentionnent l’indication « sans PFOS ».
Pour ce qui est des contenants en contact avec l’alimentation, il convient d’éviter tous les emballages en papier ou en carton qui sont résistants à l’eau ou aux graisses.
Concernant les cosmétiques, leur présence se vérifie en lisant la liste des ingrédients (INCI). Parmi les principaux PFAS, on retrouve par exemple : PFTE, perfluorodecalin, perfluorononyl dimethicone, polyperfluoromethylisopropyl ether… Il y en a d’autres. Vous pouvez retrouver la liste détaillée sur le site Cosmebio17. Le mieux pour se prémunir des PFAS est de se tourner d’une manière générale vers les labels bio.
Pour éviter les PFAS dans l’eau du robinet, l’une des méthodes les plus couramment utilisées pour les éliminer serait le charbon actif. Il s’avère globalement plus prudent de toute façon de filtrer votre eau.
D’une manière générale, on peut réduire son exposition aux PFAS en utilisant des produits de consommation portant des étiquettes vertes.
Ne dit on pas, “un homme prévenu en vaut deux ?”
Vos choix sont entre vos mains...
Marion Kaplan et Myriam Marino
Notes :
1 - Polluants éternels : l’essentiel sur les PFAS en 5 questions, Vie Publique, 24 juin 2024 ; PFAS ou polluants éternels et santé au travail : explications de l’INRS
Ainsi que l’INRS
2 –Acide perfluorooctanesulfonique (PFOS) et acide perfluorooctanoïque (PFOA)
3 – Centre international de recherche sur le cancer, CIRC
4 - Les perturbateurs endocriniens altèrent le fonctionnement du système endocrinien en interagissant avec la synthèse, la dégradation, le transport et le mode d’action des hormones. Ils entraînent un effet toxique via les modifications physiologiques engendrées par ces perturbations. Pour rappel, le système endocrinien regroupe les organes qui secrètent des hormones : thyroïde, ovaires, testicules, hypophyse… Libérées dans la circulation sanguine, les hormones produites par ces organes vont agir à distance sur des fonctions de l’organisme comme la croissance, le métabolisme, le développement sexuel, le développement cérébral ou encore la reproduction. Il s’agit donc d’un système de communication entre organes. Perturbateurs endocriniens - Des risques potentiels ou avérés pour la santé humaine, Inserm
5 – Ning Ding et al. Perfluoroalkyl and polyfluoroalkyl substances (PFAS) and their effects on the ovary, Human Reproduction Update, 29 mai 2000
6 - EFSA, 2018
7 - Ingelido et al., 2018 ; Numata et al., 2014
8 – Emerging chemical risks in Europe – ‘PFAS’, European Environment Agency, EEA ; AEE en français
9 – AEE
10 - CDC, 2019
11 - Tandis que les PFAS à longue chaîne s’accumulent chez les humains, les animaux et les sédiments/sols, les PFAS à courte chaîne s’accumulent dans l’environnement (EPA allemande, 2017, 2018) en raison de leur persistance et de leur grande mobilité dans l’air et dans l’eau), AEE
12 – AEE
13 et 14 - Un point sur le PFAS, Inserm, 4 avril 2024
15 – Hailey E. Hampson et al. The potential mediating role of the gut microbiome and metabolites in the association between PFAS and kidney function in young adults: A proof-of-concept study, Science of The Total Environment, Volume 954, 1er décembre 2024
16 – Inserm, Les perturbateurs endocriniens, cité en note 4
17 – Comment reconnaître les PFAS dans vos cosmétiques ? Cosmebio, à cette adresse : https://www.cosmebio.org/fr/nos-dossiers/ingredient-cosmetique-nocif-PFAS/#:~:text=Comment+reconnaitre+les+PFAS+dans,PTFE