30 / 04 / 2020

Enquête sur la bactérie Prévotella et la Covid 19

Comme dirait Idriss Aberkan, nous sommes dans un brouillard de guerre. Que ce soient pour les traitements, pour les solutions de protection ou pour les mesures de déconfinement, il n'y a pas un jour sans que nous soit révélé un traitement miracle tout de suite contredit par les autorités sanitaires, ou une origine criminelle venant de Chine, ou une date de déconfinement, tout de suite suivie de tellement d'interdictions qu'on se demande si on sortira un jour de chez nous !

La dernière en date nous vient d'Israël où des scientifiques ont révélé que le virus ne tuerait pas directement, mais par l'intermédiaire d'une bactérie intestinale qui affecterait, la fameuse Prévotella.

Ce serait cette bactérie infectée par le CORONAVIRUS qui, devenant virulente, déclencherait l'hyper réaction immunitaire qui délabre les poumons et tue les malades.

Le magazine Science et Avenir est revenu sur cette étude en révélant l'intox.

J'ai voulu en avoir le cœur net et j'ai demandé au docteur Maurice Bessoudo*, en qui j'ai toute confiance puisqu'il fait partie de mes professeurs, de nous éclairer sur ce sujet.

Interview du Dr Maurice Bessoudo

Pour comprendre la toxicité d'une bactérie, il faut comprendre dans quel contexte elle est située. 

Le terme microbiote désigne des familles de bactéries, mais aussi d’archées (micro-organismes unicellulaires procaryotes c'est-à-dire qui n'ont pas de noyau ni d'organites, à l'instar des bactéries), de champignons et de virus qui se partagent un territoire tout le long du tube digestif. Dans ce territoire, les bactéries sont les plus nombreuses et se repartissent tout le long du tube digestif, de la cavité buccale jusqu'au rectum. Depuis la bouche jusqu'au ¾ de l’intestin grêle, il s’agit de bactéries capables de vivre au contact de l’oxygène, elles sont dites aérobies. On retrouve d’autres bactéries aérobies dans la partie gauche du gros intestin jusqu’au rectum. Entre ces 2 territoires, se trouve une zone privée d’oxygène, ou des bactéries vivent en anaérobiose , c'est-à-dire sans oxygène , donc de la fin de l’intestin grêle jusqu'au début du colon gauche.

Mais d’où viennent ces bactéries ?

Le nouveau-né a un premier contact avec le monde bactérien (aérobie) lors de son passage vaginal (bactéries nommées lactobacilles, prevotella , sneathia) puis croise les bactéries aérobies de la zone péri anale (l'anus) et découvrira les premières bifidobacteries (anaérobies) lors de la tété. Certaines études tendent à démontrer qu’un contact entre les bifidobacteries intestinales maternelles et le nouveau-né ont déjà lieu pendant la grossesse par voie transplacentaire. Cependant actuellement , il est toujours admis que le bébé nait sans aucune bactérie dans son appareil digestif jusqu’au premier contact. Bien entendu, si l’accouchement ne se fait pas par voie naturelle mais par césarienne, les premiers ensemencements bactériens se feront par les manipulations du médecin, des infirmiers puis des parents, et s’il n’y a pas d’allaitement au sein, l’origine des bactéries se fera par le contact avec l'environnement proche.


Comment ces bactéries s’installent elles en nous ?

Les bactéries de la partie supérieure de l'intestin grêle, ainsi que celles de la dernière portion du colon, consomment de l'oxygène qui, en transitant au fur et à mesure dans le tube digestif, permettent un appauvrissement de l'oxygène, favorisant ainsi l'installation des bactéries anaérobies entre ces 2 zones.

Il y a 3,7 milliards d'années, lorsque la vie s'est initiée sur terre, l'atmosphère était dénuée d'oxygène. Elle était anaérobie. L'atmosphère s'est oxygénée il y a 2 milliards d'années. Pourrait-on dire que nos ancêtres sont présents en nous?

La colonisation de l'appareil digestif va s'opérer progressivement en sélectionnant pour chacun 160 espèces parmi les 2500 espèces bactériennes existantes. Ces espèces élues sont sélectionnées en fonction des événements rencontrés au cours de la vie, du type d'alimentation, mais aussi des médications, comme la prise d'antibiotiques consommés avant l'âge de 2 ans, ce qui est délétère pour le microbiote qui est en cours d'apprentissage à cette période, car la flore définitive, dite flore commensale, est définitivement installée à partir de l'âge de 24 mois.

C'est à partir de ce moment, à 24 mois, que les Bacteriodes se multiplieront grâce aux protéines et aux graisses tandis que les Prevotellas se nourriront de fibres et de glucides.

Le panel sélectionné et installé après 24 mois, demeurera le microbiote de l’individu de l’âge adulte à ses 60 ans environ. Ainsi, on détermine une flore dominante, une flore sous dominante et une flore passagère. Chaque individu a un microbiote unique, composé de bactéries qui lui sont propres avec un panel commun à tout un chacun de 15 à 20 espèces, dont l’espèce prevotella. Les proportions des différentes espèces varient chez chaque individu. Des chercheurs ont tenté de différencier les individus à l’instar du groupe sanguin , en fonction de ce qu’ils appellent les entérotypes. Cependant, l’extrême diversité du microbiote à travers la planète, a fait exploser ce concept si séduisant au départ.

Ainsi on retrouve dès l’âge de 2 ans , en plus ou moins grand nombre, l’espèce prevotella dans l’appareil digestif de l’individu, de la cavité buccale au colon , avec une variation du début à la fin de la vie. Il n’est pas concevable , pour expliquer les disparités d’atteinte grave par le SRAS- CoV-2 ,d’avancer l’absence de prevotella chez l’enfant, puisque ce n’est pas le cas, ni chez l’adulte de plus de 60 ans, où cette espèce bactérienne existe en abondance, même si sa quantité est variable selon les individus.

Prevotella est considérée comme gram négatif (les gram moins favorisent l'inflammation) du fait de la composition de sa membrane (de son enveloppe). Elle peut être dangereuse si elle entre en contact avec notre immunité, ou si elle rencontre par l'intermédiaire de la muqueuse, un terrain propice à son développement excessif.


Peut-on préciser dans quelle circonstances l’espèce Prevotella pourrait être impliquée dans une pathologie respiratoire ?


Deux cas de figures peuvent être retenus :

1. Prevotella est en développement excessif dans le colon dû à un désordre biologique de la flore intestinale nommé dysbiose.

Du fait de sa caractéristique gram négatif, elle est porteuse d’une structure particulière nommée LPS (LipoPolySaccharide) formant à sa surface comme une sorte de chevelure, dont chaque cheveu (un LPS) est capté par des récepteurs logés à la surface des cellules de la muqueuse digestive ( gencive, intestin, colon).

La détection d’un trop grand nombre de ces LPS va générer une réponse des dites cellules à récepteurs. Cette réponse est une inflammation à l’intérieur de notre corps. La composition de cette inflammation comporte, en particulier, la production d’oxydants ou radicaux libres, dont l’activité devrait être neutralisée par les antioxydants (certains sont fabriqués par le corps, les autres doivent être apportés par l’alimentation à base de fruits et légumes). Si l'inflammation devient chronique, notre système antioxydant va s'appauvrir ce qui va générer une vulnérabilité lors d’un épisode infectieux s’accompagnant d’une inflammation. "En effet, Mère Nature a prévu qu'en cas d'attaque, l'inflammation générée sera contrôlée dans son ampleur et dans sa durée (en grande partie par les acides gras poly insaturés) et sera contenue dans un périmètre (par les antioxydants)"

Lors d’une infection pulmonaire, de quelque nature que ce soit, la carence en antioxydants expose à une gravité de la pathologie tout-à-fait indépendante de l’agent pathogène.

Il n’est pas concevable de décrire une mobilisation de bactéries prevotella de l’intestin vers les poumons par voie sanguine, pour expliquer une réactivation d’une infection virale dont la bactérie transporterait le matériel ARN. Une décharge de bactérie gram négatif dans le sang, déclenche un choc septique qui peut rapidement être grave. D’autre part, il n’a jamais été décrit d’incorporation d’ARN viral dans l’ADN d’une bactérie.

2. Les dentistes savent très bien que Prevotella est souvent impliquée dans une pathologie infectieuse buccale (abcès du parodonte ou autres infections parodontales) : l’infection pulmonaire et ORL à Prevotella est connue, avec ses propres gravités et n’a rien à voir avec une coïnfection à virus.


Alors, comment expliquer la vulnérabilité des personnes en obésité sévère et des diabétiques ?

Deux phénomènes physiopathologiques devraient attirer notre attention :

1/ Le premier, nous l’avons évoqué, concerne l’appauvrissement du système antioxydant dû à une inflammation chronique. En effet chez les obèses et les diabétiques de type II par insulinorésistance, on observe une dysbiose corrélée à une inflammation.

2/ Le second permet, me semble t’il, de faire le lien entre les vulnérabilités des personnes âgées et des sujets en état d'hyperinsulinisme (donc les obèses et les diabétiques type II). Mais pour aborder ce point crucial , nous devons comprendre la place primordiale de la voie biochimique qui gère de main de maitre, le déclenchement de la guerre contre l’agresseur suivi, en temps et en heure, par la nécessité de l’arrêt du combat. La pierre angulaire de tout cet édifice fondamental est une enzyme qui pourrait être la première protéine à action enzymatique inventée par la vie il y a plus de 3 milliards d’années.

Voici ce qui se passe :

Lorsqu’il y a une agression, le premier système immunitaire informé est le système immunitaire inné. C'est le plus ancien, c'est lui qui produit les oxydants agissant comme des multitudes de chalumeaux, mais aussi c'est celui qui génère un complément se comportant comme une énorme flèche (comme celle tuant le dragon dans GOT) et de nombreux bubbles énormes, les macrophages, qui englobent et digèrent le coupable.

Le second système immunitaire est appelé le système immunitaire adaptatif. Il est plus récent dans l’histoire de la vie, c'est qui lui va produire des anticorps spécifiques et en garder une mémoire.

Donc, une cellule de défense reçoit le message qu’un agresseur s’est introduit en passant une barrière. A la réception de ce message , cette cellule va envoyer un garde , la phospholipase A2, et réveiller les généraux au repos représentés par des corps chimiques dont on entend souvent parler : les acides gras.

Lorsque on mange du gras, (des lipides), on mange en même temps un peu de vitamines ( A,D,E,K), un peu de phospholipides , un peu de cholestérol , mais 90 % sont des acides gras groupés par 3: on les nomme triglycérides. Ces acides gras vont être utilisés par le corps pour fabriquer l’enveloppe , la membrane, de toutes nos cellules dont bien sûr, les cellules immunitaires ;

Vous venez de comprendre que votre alimentation a une influence considérable sur la composition de cette enveloppe. Le foie est capable de fabriquer presque tous les acides gras sauf deux. Nous devons donc en manger pour les retrouver dans la structure de nos membranes cellulaires. Il se trouve que les deux en question, sont les deux principaux qui vont gérer l’inflammation : il s’agit des acides gras polyinsaturés dont vous connaissez les noms : les Oméga 6 et les Oméga 3 ;

Parmi les Omega 6, la forme active qui a un rôle d’amplificateur de la réponse immunitaire, est l’Acide Arachidonique et celui-ci est essentiellement d’origine alimentaire.

Parmi les Omega 3, les formes actives EPA (eicosapentaénoïque) et DHA (Docosahexaénoïque) sont le fruit d’une voie chimique de transformation dont le point de départ sont les Omega 3 de base, trouvés dans les huiles végétales. Leur rôle est primordial. Ils tempèrent l’agressivité de l’action de l’acide arachidonique puis ils résolvent l’inflammation en venant modifier le caractère de nos soldats, c’est-à-dire qu'ils transforment les cellules de guerre en cellules de paix, tout en réparant les dégâts.

Cependant pour bénéficier de ces formes actives, vous devez avoir une bonne fonction de la voie de transformation.

Cette voie de transformation fait intervenir plusieurs enzymes dont la plus importante, est nommée DELTA 6 DESATURASE .

Différentes situations micro nutritionnelles inactivent cette enzyme et empêchent l’arrêt de l’orage immunitaire : parmi ces situations il y a l’excès d’insuline dans le sang, ce qu'on retrouve chez beaucoup d’obèses et de diabétiques de type 2 et, hélas, l’âge. Différentes études démontrent que la Delta 6 désaturase est inactive passé l'âge de 70 ans.

En conclusion :

Au terme de notre réflexion, il apparait que deux systèmes de l’environnement nutritionnel doivent impérativement être équilibrés :

- Le statut en antioxydants avec leurs cofacteurs

- Le statut en Acides gras polyinsaturés avec un équilibre entre Acide arachidonique et EPA-DHA. Cet équilibre devrait être de 1 oméga 3 pour 4 oméga 6.

Chez les sujets hyper insuliniques ou âgés, il est illusoire de leur conseiller de consommer des huiles végétales riches en Omega 3. Cela n'aurait aucun effet positif car leur Delta 6 désaturase ne fonctionnant pas, il n'y aurait aucun effet sur leur système immunitaire. Il faudrait plutôt leur conseiller de consommer des Omega 3 dits allongés (EPA et DHA) soit sous forme de compléments alimentaires de bonne qualité, ayant de préférence des labels fiables de non oxydation et de non contamination aux métaux lourd, soit sous forme de poissons gras de petites tailles (sardines, maquereaux, anchois).

La Dysbiose à Gram négatif peut être impliquée dans la gravité de l’infection pulmonaire due au Covid 19, mais à priori elle est due à la carence en antioxydants et en oméga 3.

Il est possible que l’extrême gravité sanitaire de cette pandémie au SRAS-Cov-2 soit le révélateur de l’impact physiopathologique des dérives alimentaires appauvrissant l’environnement micro nutritionnel de l’humain depuis 60 ans.


Marion Kaplan selon l'interview du Dr Maurice Bessoudo *


Medecin diplomé en medecine nutrutionnelle et fonctionnelle,

Conferencier ,enseignant , praticien en cabinet médical.

DU de Nutrition Humaine (NICE) ,

DU Alimentation santé micronutrition (DIJON) ;

DIU de Medecine Morphologique et Anti-Age (PARIS)

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