5 / 01 / 2023

Écarts alimentaires : comment ne pas culpabiliser

Les fêtes de fin d’année ont pour beaucoup d’entre vous été l’occasion de délicieux moments de retrouvailles, de partage et de convivialité autour d’une bonne table et donc… de quelques petits écarts alimentaires. Certains d’entre vous m’ont posé des questions à ce sujet. Commencez par ne pas culpabiliser. Il n’y a pas de mal à se faire du bien comme on dit, tant que cela reste de temps en temps. Nous sommes tous humains et fêtes ou pas fêtes, il nous arrive à tous de « craquer ». Voici mes petits trucs pour aider votre corps à mieux les supporter et vous faire plaisir sans culpabiliser.

Je suis humaine comme vous, je fais aussi des petits écarts, même si cela n’arrive pas trop souvent parce que mon corps ne l’accepte pas. Si je craque, c’est sur le sucré et je pense que c’est pareil pour vous. Mon péché mignon, c’est la tarte tatin et la crème fraîche (de chez Bernard Gaborit quand même !).


1. Si vous êtes invité et que vous savez que vous allez craquer sur le dessert - parce que c’est trop bon le fondant au chocolat, les profiteroles à la chantilly ou même la glace à la vanille -, la première chose à faire avant votre repas, avant de partir, c’est de boire un grand verre d’eau dans lequel vous aurez dilué une cuillère à café de vinaigre de cidre. Le sucre entraîne un pic de glucose comme vous le savez. Cette « potion » va donc lisser un peu votre glycémie.


2. Ensuite, commencez par manger des légumes à ce repas. Comme nous l’avons vu précédemment, notre système digestif ne décompose pas les fibres en glucose. Elles s’évacuent lentement, intactes. Qui plus est les fibres ont trois super pouvoirs : elles réduisent l’action de l’alpha-amylase (l’enzyme qui décompose l’amidon en molécules de glucose), elles ralentissent la vidange gastrique (en présence de fibres, les aliments transitent plus lentement de l’estomac à l’intestin), et elles tapissent l’intestin grêle d’un gel visqueux qui freine le passage du glucose dans le sang. Tout ceci a pour effet, là encore, de lisser la courbe de glycémie. L’impact des glucides en général, et de votre fondant au chocolat en particulier, consommés après les fibres sur notre organisme se trouve ainsi atténué. Vous pouvez prendre le même plaisir à les déguster en subissant moins de conséquences négatives1.


3. Troisième petit truc : mastiquez bien votre petit écart, salivez bien. Prenez votre temps en le mangeant, prenez conscience de ce que vous mangez, de chaque bouchée. Savourez pleinement, profitez de ce moment de plaisir intense qui fait que vous serez rassasié, comblé, très vite, et vous n’aurez pas à vous resservir compulsivement.

En un mot, prenez du plaisir sans culpabiliser. La culpabilité, c’est du stress. Si vous faites taire une envie, elle reviendra au galop, qui plus est amplifiée. Vous n’arriverez pas à vous arrêter à cause du trop gros manque à combler.


Prenez ce plaisir et vous verrez que, finalement, en prenant ce plaisir sans culpabilité, non seulement vous allez digérer mieux, mais en plus vous allez envoyer un signal positif à vos milliards de petites amies, ces petit soldats de la paix qui œuvrent jour et nuit à votre bien-être global : votre microbiote intestinal. On le sait maintenant, nos bactéries ont leur propre langage, elles discutent entre elles, et si vous leur donnez un signal positif, elles ne vont pas trop vous embêter.


Bien entendu, si vous répétez ces écarts, surtout sucrés, vous allez solliciter vos organes en donnant plus de travail au pancréas notamment, et votre foie ne va pas trop apprécier non plus… Mais, j’insiste, vous pouvez vous permettre un petit écart de temps en temps, car il ne s’agit pas non plus de tomber dans l’orthorexie, c’est-à-dire l’obsession d’une alimentation saine et un besoin de contrôle permanent sur son alimentation. C’est la porte ouverte à l’anxiété et à la dépression à plus ou moins terme. Et c’est tout bonnement invivable à mon sens.


Vous savez, il m’arrive aussi de ne pas manger bio. Quand je mange au restaurant par exemple, je ne suis pas sûre que ce soit bio. Après, bien sûr, si je veux manger de la viande, je vais sélectionner un restaurant où je sais qu’ils servent des bonnes viandes, issues d’animaux bien élevés.


Les enzymes digestives


Parmi les petits trucs qui vont aider votre corps à supporter votre petit écart, vous avez aussi quelques compléments alimentaires, comme la berbérine, qui va lisser votre glycémie aussi et va aider votre microbiote, ainsi que des enzymes digestives comme des lipases, protéases, amylases… J’en prends, pour ma part, à chaque repas. Vous pourrez les trouver en magasins diététiques, notamment. Côté labos, Energetica Natura a de très bons produits.



Rien ne sert de culpabiliser

Rien ne sert de culpabiliser de toute façon, le sucre, pour l’humain, est une histoire d’amour qui remonte à la nuit des temps. C’est notre première et éternelle consolation.

Nous sommes tombés dedans quand nous étions petits, comme Obélix dans la potion magique. Comme le souligne Olivier Soulier2, dès son implantation, l’œuf « tombe » dans la paroi de l’utérus dont les cellules superficielles (dites déciduales) sont remplies à exploser de glycogène (du sucre sous forme stockée). C’est comme si notre œuf atterrissait dans un dépôt de sucre.

Ce sucre va donner de l’énergie à l’œuf à bout de réserve, mais il va aussi coder profondément le fonctionnement de l’embryon, futur être humain.

Nourri au départ par le sucre de la couche déciduale, l’embryon le sera ensuite par le cordon ombilical pour tous ses besoins, avant que le sein ne prenne le relais.

L’estomac plein est pour le petit bébé la sensation de sécurité et de plénitude. La tranquillité par le remplissage, et nous en gardons tous la mémoire.

Jessie Inchauspé nous apprend de son côté que si nous aimons tant le sucré, c’est parce qu’à l’âge de pierre, le sucré était synonyme d’aliment à la fois sûr (aucun aliment n’est à la fois sucré et vénéneux) et plein d’énergie. Nous avons donc appris à éprouver du plaisir en mangeant un aliment sucré3.


Notre cerveau en est fou


Quand nous mangeons du sucré, notre cerveau est inondé de dopamine. Nous n’en avons jamais assez, à en mourir…

Une expérience a été menée en 2016 sur des souris que les chercheurs ont équipé d’un levier avec lequel elles pouvaient activer leurs propres neurones dopaminergiques. Si elles étaient livrées à elles-mêmes, elles passaient leur temps à actionner le levier, encore et encore et encore, jusqu’à oublier leurs besoins fondamentaux : manger et boire. Les chercheurs ont dû mettre fin à l’expérience, sinon les souris allaient mourir. L’obsession de la dopamine. Les animaux dont les êtres humains font partie aiment vraiment la dopamine, et la consommation d’aliments sucrés est un moyen facile d’en sécréter, souligne Jessie.

Cette expérience montre à quel point nous ne sommes pas responsables de notre envie de dévorer du chocolat ou toute autre petite douceur.


Et quand les bactéries s’en mêlent …

Nous avons vu ensemble dans un précédent article que nos choix alimentaires pouvaient être guidés par nos bactéries intestinales. Les microorganismes intestinaux en effet peuvent tout à fait nous pousser à manger des aliments qui les arrangent (même si cela peut avoir un effet négatif sur la santé de l’hôte). Ils libèreraient, pour cela, des molécules de signalisation dans le tube digestif, créant des substances qui provoquent l’envie de consommer certains aliments.

L’intestin et le cerveau communiquent en permanence, certains types de molécules jouant le rôle d’intermédiaires. Ces sous-produits de la digestion signalent que vous avez mangé suffisamment de nourriture ou que vous avez besoin de certains types de nutriments. Mais les bactéries intestinales peuvent produire certaines de ces molécules, détournant potentiellement cette ligne de communication et modifiant le sens du message dans leur intérêt. Un de ces messagers est le tryptophane, un acide aminé essentiel qui est produit par les microbes intestinaux. Quand il est capté par le cerveau, il est transformé en sérotonine, qui envoie un signal de rassasiement, puis en mélatonine, qui rend somnolent. Un exemple très parlant de la façon dont les bactéries peuvent intervenir dans nos choix alimentaires4.

J’ai beaucoup parlé d’envies sucrées, mais c’est pareil pour les envies salées : vous avez choisi de faire un écart, vous le vivez à 100% avec plaisir et sans culpabilité donc, et vous verrez que vous ne mangerez pas le paquet de chips entier, par exemple. Tout est dans la modération et dans la juste mesure, et… pas tout le temps ! Vous n’en éprouverez que plus de plaisir.


PODCAST :

 

Qui ne s’est pas un jour senti coupable ? Qui n’a pas eu de remords pour une sucrerie avalée sous l’impulsion ou le fameux « mot qui dépasse notre pensée ».

La culpabilité nous tourmente et s’inscrit même dans tous nos rouages sociaux. Alors qu’est-ce cette culpabilité ? Et comment peut-on s’en dédouaner ?

La psychologue Cécile Kapfer se penche sur ces fonctionnements qui nous minent et nous compliquent l’existence.

Marion Kaplan & Myriam Marino.


Notes :

1 - Faites votre révolution glucose, Jessie Inchauspé, Éd. Robert Laffont

2 - La digestion, Olivier Soulier, Éd. Sens & Symboles

3 – Cité en note

4 - Les bactéries intestinales nous feraient manger ce qui les arrange, La Nutrition, Sarah Amiri, 19 août 2014, mis à jour le 27 juin 2022

* Sur les enzymes digestives : Biotics 6 plus et hydrozyme de chez Energetica Natura



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